C’est ainsi que Brasidas traversa la Tkessalie comme à la course, avant qu’on fût en mesure de l'arrêter. D se rendit auprès de Perdiccas et en Chalcidique. Perdiccas et les villes insurgées du littoral de la Thrace avaient appelé du Péloponèse cette armée, à cause des craintes que leur inspiraient les progrès des Athéniens. Les Chaki-déens s’attendaient à se voir attaqués les premiers; de plus, ils'étaient secrètement stimulés par les villes de leur voisinage non encore révoltées. Quant à Perdiccas, sans être positivement brouillé avec les Athéniens, ses anciens démêlés avec eux lui avaient donné de l’ombrage. Il aspirait aussi à soumettre Arrhibéos, roi des Lyncestes. Au surplus, l’envoi de cette armée péloponésienne fut singulièrement facilité par les revers qui pesaient alors sur Lacédémone. Comme les Athéniens ne cessaient d’infester le Péloponèse et spécialement la Laconie , les Lacédémoniens pensèrent que le meilleur moyen de faire diversion était de jeter une armée chez leurs alliés ; d'autant plus que ceux-ci offraient de la défrayer, et l’appelaient dans un esprit de révolte. D’ailleurs, ils n’étaient pas fâchés d’avoir un prétexte pour envoyer au dehors un cehain nombre de leurs Hilotes; car ils craignaient qu’ils ne profitassent de l’occupation de Pylos pour se soulever. Les Lacédémoniens sont dans une perpétuelle appréhension au sujet des Hilotes: et, comme à cette époque ils redoutaient leur jeunesse et leur multitude, ils poussaient à l’extrême les précautions à leur égard C’était le but d’une institution atroce, attribuée à Lycurgue et nommée κρυπτεΐα, la chasse aux Hilotes (Plutarque, Lycurgue, xxvm). Les jeunes Spartiates sortaient en secret de la ville, se répandaient dans les campagnes en se cachant pendant le jour, et la nuit ils couraient sus à tous les Hilotes qu’ils rencontraient, pour les tuer et diminuer ainsi leur nombre. Platon (Des lois, I, p. 783) cherche à atténuer la barbarie de cette institution. . C’est ainsi qu’ils avaient fait publier que ceux d’entre eux qui croyaient leur avoir rendu le plus de services à la guerre eussent à se déclarer et qu’ils seraient affranchis. C’était une manière de les éprouver ; car on pensait bien que les plus désireux de liberté seraient aussi les plus enclins à la révolte. Ils en choisirent jusqu’à deux mille, qui firent le tour des temples, la tête couronnée comme affranchis ; mais peu après on les fit tous disparaître, sans que personne ait jamais su comment ils avaient péri. On saisit donc avec empressement l’occasion d'en faire partir six cents avec Brasidas en qualité d’hoplites. Le reste de son armée se composait de mercenaires levés par lui dans le Péloponèse. C’était à sa demande expresse que les Lacédémoniens avaient mis Brasidas à la tête de cette expédition. Les Cbalcidéens avaient désiré avoir nn homme qui jouissait à Sparte d’une grande réputation d’énergie, réputation justifiée par les services signalés que, depuis son départ, il ne cessa de rendre à Lacédémone. En effet, la justice et la modération qu’il montra dès l’abord à l’égard des villes en détachèrent plusieurs d’Athènes ; d’autres lui furent livrées par trahison. Aussi les Lacédémoniens, lorsque plus tard ils voulurent faire la paix, eurent des places à donner en échange de celles dont ils demandaient la restitution, indépendamment du répit procuré au Péloponèse. Longtemps après, lors de la guerre qui suivit l’expédition de Sicile Pays situé au N. O. de la Macédoine, sur les confins de Tlllyrie. Les Lyncestes, alors indépendants, furent plus tard annexés à la Macédoine. , la valeur et la sagesse déployées dans le temps par Brasidas, et que les uns connaissaient par expérience, les autres par ouï-dire, inspiraient encore aux alliés d’Athènes une inclination prononcée en faveur des Lacédémoniens. Comme il fut le premier envoyé à l’étranger et qu’il fit briller une vertu accomplie, il laissa après lui la ferme conviction que tous les autres lui ressemblaient.